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Les mauvais élèves du Net Promoter Score

Rédigé par Louis de Froment | 18 août 2017 16:03:00

Dans les années 30, les entreprises ne calculaient pas leur Net Promoter Score. Cela n'empêchait pas Henry Ford d'affirmer déjà que «les deux choses les plus importantes n'apparaissent pas au bilan de l'entreprise : sa réputation et ses hommes.»  

En mesurant la propension d'un client à recommander ou non une marque à ses proches, le NPS donne une bonne idée du niveau de réputation d'une entreprise. On l'a vu dans notre dernier article, un excellent NPS est souvent gage de performance économique et financière.

Dans un précédent billet, nous nous sommes penchés sur les bonnes pratiques des champions du NPS (Apple, Amazon et Netflix) qu'on pourrait résumer ainsi : des offres simples, compréhensibles, innovantes associées à un Service Client irréprochable et une excellente réputation.

 

S'il existe indubitablement un lien entre NPS élevé et performance économique, qu'en est-il des sociétés qui ont une mauvaise réputation, un NPS faible voire négatif ou qui ne sont tout simplement pas Customer Centric ? Les conséquences financières sont-elles réellement désastreuses ? Quels sont les pièges à éviter ?

En voulant écrire cet article, je me suis très vite heurté à un obstacle : le manque d'informations publiques sur les entreprises qui ont un NPS faible. Je me suis donc appuyé sur les données disponibles que l'on trouve sur NPS Benchmark (souvent des sociétés américaines) mais aussi sur les cas de grandes entreprises cotées en bourse, qui, étant soumises à une obligation de transparence sur leurs résultats ne peuvent passer sous silence leurs difficultés et l'érosion de leurs portefeuilles clients.

 

1/ Avoir des pratiques commerciales abusives

 

Le secteur des assurances est très développé aux Etats-Unis (1 154 Mds $ de CA en 2015 et 28,9% de part de marché mondiale) mais aussi ultra consolidé : quelques mastodontes comme Aetna, United Healthcare, Cigna ou Wellpoint comptent chacun 15 à 45 millions d'adhérents.

C'est souvent dans ces conditions de rente de situation qu'on voit apparaitre des pratiques commerciales abusives. Refuser pendant des années les demandes d'indemnisation pour handicap malgré de nombreuses plaintes en fait partie. Cela n'a sans doute pas aidé la société CIGNA (NPS à -1)  à se construire une bonne réputation.

 

 

Des nouveaux venus comme Oscar (valorisé à 3 milliards de $) ont pu en profiter pour venir bousculer les usages de cette industrie traditionnelle. La disruption passe souvent par une meilleure expérience client.  Oscar se démarque des autres géants de l'assurance avec des offres ultra simples, et un suivi minutieux des parcours des assurés grâce aux nombreuses datas collectées. 

 

2/ Délaisser son Service Client 

 

 

On en a déjà parlé, il existe une corrélation positive entre le NPS d'une entreprise et la qualité de son Service Client. Si Amazon, Apple et Netflix sont connus pour l'excellence de leurs Service Client, un contre-exemple revient souvent : c'est le groupe de médias américain Comcast (NPS de -5).

Comcast est le premier câblo-opérateur américain. Son Service Client est réputé pour être l'un des pires aux Etats-Unis. 

Les créateurs de South Park, si influents aux Etats-Unis sur les sujets de sociétés ont même créé un épisode sur le sujet. Précisons toutefois qu’il s’agit d’un type d’humour très potache.

 

 

Le Service Client de Comcast est si mauvais qu’il a d'ailleurs fait l'objet d'une audition avec le Sénat américain

 

 

Au cours de cette audition, le groupe s'est engagé à mettre en place une série de mesures pour améliorer sa relation client notamment :

 

3/ Ne pas être être transparent dans les conditions de ventes

 

 

 

Vous vous souvenez peut-être de la vidéo virale et particulièrement provocatrice du fondateur de McAfee en 2013 dans laquelle il feint d’expliquer aux innombrables clients mécontents comment désinstaller son logiciel anti-virus. A cette époque, la société refacturait automatiquement ses clients ce qui entraînait des plaintes.

Toutefois, McAfee n'est pas isolée dans ce cas. Quand on analyse les réclamations des clients sur les forums de consommateurs, beaucoup font référence à ces entreprises qui réalisent des prélèvements automatiques.

Pourtant dispenser un client de renseigner son code de carte bleue avant chaque transaction peut être positif en terme d'expérience utilisateurs. D'ailleurs des entreprises comme Netflix ou Spotify qui ont des NPS élevés s'appuient bien sur un modèle d'abonnement mensuel reconductible tacitement pour facturer leurs clients. Alors comment explique t-on ces différences ?

 

Le pire scénario pour le NPS : ne pas répondre aux attentes de ses clients et empêcher les clients de se désinscrire.

 

 

Dans le premier cas, la situation est subie  : non seulement les clients ne sont pas satisfaits du service, mais l'entreprise vient compliquer les démarches pour se désabonner. C'est la double peine. Je suis personnellement toujours surpris par les services comme Autolib où il suffit d'un clic pour s'abonner mais où on vous demande d’envoyer une lettre en recommandé minimum trois mois à l'avance pour vous désabonner… sans quoi vous êtes réengagés pour 12 mois !

 

 

Décevoir votre client et en plus l'entraver dans ses démarches de désinscription est le pire scénario en terme de satisfaction client, de réputation et donc de Net Promoter Score.

 

Plus que la pratique de prélèvement automatique, c'est bien la transparence (durée d'abonnement, modalités de résiliation du contrat, facilité à se désabonner) qui est ici en jeu. Dans un cas les clients subissent leur abonnement, dans l'autre, les clients le choisissent.

 

4/ Rester passif en cas d'insatisfaction client

 

Aux Etats-Unis, la compagnie aérienne United n'a pas très bonne réputation. Avec un NPS de 10, elle est loin derrière ses concurrents Southwest (dont le NPS est à 62),  ou encore JetBlue (NPS à 68). Les passagers d'United se plaignent des retards fréquents, des annulations de vols, de la flotte vieillissante, ou encore de la mauvaise qualité des plateaux repas.

 

Bien qu'United ait commencé relativement tôt à mesurer son NPS, la compagnie ne fait pas grand chose pour régler les problèmes et améliorer l'expérience de ses passagers.

 

 

La vidéo d'un passager qui se fait expulser manu militari d'un vol, largement relayée sur internet en mars 2017 a créé semble-t-il une onde de choc chez les dirigeants d'United. Le conseil d'administration a ainsi décidé d'indexer une partie de la rémunération de son PDG Oscar Munoz sur le niveau de satisfaction des clients.

Mesurer son Net Promoter Score n'a jamais été la garantie d'obtenir un bon score. Si vous voulez progresser, le plus important est de fermer la boucle avec vos clients en reprenant contact avec tous ceux qui vous ont donné une mauvaise note.